Comme le rapporte le magazine économique Challenges dans un article du 7 juillet consacré aux ambitions «made in France» de Toyota, nombre de constructeurs automobiles présents sur le territoire français semblent suivre une toute autre direction.
«Daimler veut vendre son usine lorraine (Smart). Renault compte arrêter la production de véhicules à Flins, Maubeuge, Dieppe. PSA va fermer son siège de Rueil», rappelle par exemple Challenges à ce sujet.
Concernant le cas lorrain de Daimler, 300 salariés de l'usine Smart de Hambach (Moselle) ont par exemple arrêté la production dans la matinée du 9 juillet et se sont rassemblés devant le centre de communication où avait lieu un comité social et économique (CSE) extraordinaire avec la direction qui souhaite vendre le site où travaillent actuellement de 1 400 à 1 500 salariés. Comme le rappelle Le Républicain Lorrain, la direction de Daimler, qui se dit en surcapacité de production, entend notamment délocaliser en Chine la fabrication de la Smart électrique à partir de 2022. Quant à l'activité dans la commune de Hambach, la société Ineos, propriété du milliardaire britannique Jim Ratcliffe, «a annoncé négocier avec Daimler le rachat du site pour y produire son futur 4X4 Grenadier», rapporte l'AFP.
Malgré les annonces de la direction qui souligne son objectif de ne procéder à «aucun licenciement», en ayant notamment évoqué lors du dernier CSE la possibilité d'«un transfert de compétences [...] vers l'usine [allemande] de Rastatt», l'intersyndicale CGT, FO, CFE-CGC, CFTC et CFDT a confié auprès Républicain Lorrain vouloir se battre pour l'avenir du site : «Si Daimler se débarasse de notre site, ce n'est ni la faute des salariés ni la faute du Covid-19 qui a bon dos, mais bien d'une gestion et de choix stratégique du groupe [...] Daimler continue à verser des dividences et à payer un champion du monde de Formule 1 40 millions d'euros par an !», peut-on lire sur le site du quotidien local.
Une industrie française malmenée ?
Les opérations de rachat sont loin d'être une garantie de l'emploi dans l'industrie, même quand les nouveaux acquéreurs multiplient les engagements en ce sens. En témoigne l'exemple du rachat de la branche énergie d'Alstom en 2015 par General Electric (GE). En effet, loin d'être tenue, la promesse du groupe américain en termes d'emploi a fait place aux plans sociaux en France. Un sujet sur lequel l'économiste français Jacques Sapir pointe «la financiarisation de l'économie», nuisible à l'industrie.
Fait notable, les annonces de plans de restructuration se sont récemment multipliées dans plusieurs secteurs de l'industrie française, amenant les travailleurs, souvent soutenus par les habitants des zones en péril concernées, à manifester pour le maintien de l'emploi. «Airbus, Hop !, Nokia, Sanofi : des salariés mobilisés contre les suppressions d’emplois», titrait par exemple Le Monde ce 8 juillet.
En tout état de cause, nombre d'observateurs ont souvent reproché à l'Etat un engagement insuffisant au regard du déclin industriel de la France. Sambre et Meuse, Whirlpool ou encore GoodYear, sont autant d'épisodes tragiques qui resteront en travers de la gorge des salariés laissés sur le carreau après la fermeture de leur usine. En 2016, à l'aube de sa campagne présidentielle, alors qu'il venait de quitter ses fonctions au ministère de l'Economie et de l'Industrie, Emmanuel Macron allait jusqu'à déclarer, au sujet du premier des trois exemples susmentionnés : «C'est un échec, j'y ai ma part.»
«Tout sera mis en œuvre pour protéger nos salariés et pour protéger nos entreprises, quoi qu'il en coûte», a en revanche déclaré le 12 mars le chef de l'Etat, au cours de son allocution filmée depuis le palais de l’Elysée, afin de rassurer les Français quant aux conséquences de la pandémie sur l'économie du pays.
Fabien Rives