Selon une estimation publiée ce mercredi 8 avril par la Banque de France, le PIB a chuté d'environ 6% sur les trois premiers mois de l'année, soit la pire performance trimestrielle de l'économie française depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Le PIB s'étant déjà replié de 0,1% au quatrième trimestre, selon l'Insee, la France est donc officiellement en récession technique, qui se traduit par deux trimestres consécutifs de recul de l’activité.
Il y a peine un mois pourtant, la Banque de France tablait encore sur une petite croissance de 0,1% au trimestre écoulé mais c'était avant que l'épidémie ne se propage massivement sur le territoire, et que le confinement ne soit imposé le 17 mars.
Au seul mois de mars, l'activité a reculé de 17%, se révélant sur les quinze derniers jours inférieure d'environ un tiers (-32%) à la normale, selon l'enquête réalisée par la Banque de France auprès de 8 500 entreprises.
Depuis 1945, seul le deuxième trimestre de 1968 avait connu un effondrement «du même ordre de grandeur», note-t-elle. Le PIB avait alors chuté de 5,3%.
Dans ce contexte d'incertitude la banque centrale française ne s'avance pas sur une prévision annuelle, mais elle considère que chaque quinzaine de confinement entraînera une perte de PIB de 1,5% sur un an.
Fin mars, l'Insee faisait la même estimation, évoquant une possible perte de 6 points de PIB cette année si le confinement devait durer deux mois. Un scénario de moins en moins improbable, alors que l'exécutif envisage de le prolonger au-delà du 15 avril.
Le mois d'avril sera «au moins aussi mauvais que la dernière quinzaine de mars», a déjà prévenu le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau, sur RTL. «La croissance sera fortement négative en 2020», a-t-il aussi affirmé, tout en anticipant un «rebond» en 2021.
«Eviter le naufrage»
Le gouvernement prépare aussi les esprits à un scénario noir cette année. En début de semaine, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a déjà prévenu s'attendre à une contraction de l'économie «très au-delà» des -2,9% enregistrés en 2009 après la crise financière de 2008, pire performance de l'économie française depuis 1945.
Et le ministre a comparé à plusieurs reprises le choc» à la Grande Dépression ayant suivi le crash boursier de 1929, insistant sur l'enjeu : «éviter le naufrage». Certains secteurs n'en sont déjà plus très loin, comme ceux du transport aérien ou du tourisme, affectés dès la propagation de l'épidémie en Asie, bien avant donc le début du confinement en France.
Selon la Banque de France, les pertes d'activité les plus fortes concernent en mars la construction, «avec une baisse à hauteur des trois quarts de l'activité normale», le commerce, les transports, l'hébergement et la restauration. L'industrie résiste à peine un peu mieux avec des sites de production qui ont tourné à un peu plus de la moitié de leur capacité en mars.
«Pas le moment de compter»
En regroupant les secteurs les plus affectés, «soit l'industrie manufacturière, la construction et les services marchands non financiers (qui représentent ensemble 55% du PIB), la perte d'activité représente environ la moitié du niveau normal», détaille la Banque de France.
De quoi justifier les centaines de milliards d'euros que le gouvernement est prêt à mobiliser pour maintenir en vie les entreprises et garantir un revenu aux salariés.
«Aujourd'hui ce n'est pas le moment de compter», a estimé le gouverneur de la Banque de France. «Dans la bataille économique qui vient [...] on ne compte pas pour sauver les entreprises, les emplois et les revenus des salariés», a-t-il insisté. Il a toutefois prévenu : «Ceci ne pourra pas durer éternellement et nous souhaitons tous qu'on aille vers une sortie progressive du confinement.»