Economie

Profondes inquiétudes au lendemain de l'OPA américaine sur Latécoère

L'OPA lancée par le fonds américain Searchlight Capital Partners sur l'entreprise française Latécoère s'est concrétisée le 4 décembre. Spécialisée dans plusieurs technologies de pointe dont le Li-Fi, cette opération soulève de nombreuses inquiétudes.

Latécoère – équipementier français en aéronautique spécialiste des aérostructures et des systèmes d'interconnexion – appartient désormais au fonds d’investissement américain Searchlight Capital Partners, au terme d’une offre publique d’achat (OPA), a annoncé le 4 décembre l’Autorité des marchés financiers (AMF).

L’OPA, présentée officiellement au mois de juin aux autorités françaises dont l’AMF, vient de se concrétiser. Le fonds américain détient à présent 62,76% de l’entreprise, dont le siège se situe à Toulouse depuis 1917, et 61,99% des droits de vote, a détaillé l’AMF dans un communiqué. Décrite comme amicale, l’OPA est en réalité la continuité de la stratégie d’acquisition de l’équipementier français. En effet, le fonds d’investissement américain avait, dès le mois d’avril, racheté 26% des parts à trois autres fonds, selon La Dépêche.

[Latécoère] est l'un des pionniers dans l'utilisation de la lumière pour échanger des informations, le Li-Fi

Latécoère, fournisseur de premier rang des grands constructeurs aéronautiques tels que Airbus, Boeing, Bombardier, Dassault Aviation ou Embraer, et employant près de 5 000 salariés dans treize pays dont 1 500 en Occitanie, a été valorisé à 365 millions d’euros par Searchlight Capital lors de l’OPA, prenant également en compte les 659,2 millions d’euros de chiffre d’affaire en 2018, pour un résultat net de 6 millions d’euros, d’après La Dépêche.

Toutefois, l’OPA n’aurait pas soulevé autant de problèmes si le cœur de métier de Latécoère ne couvrait pas plusieurs technologies stratégiques. L’équipementier toulousain est actuellement spécialisé dans les aérostructures (tronçons de fuselage, portes), les systèmes d'interconnexion (câblages, meubles avioniques et équipements embarqués), et «est l'un des pionniers dans l'utilisation de la lumière pour échanger des informations, le Li-Fi», d’après La Dépêche.

Du fait de ces secteurs d’activités sensibles, plusieurs députés avaient prévenu, fin novembre, l’Etat français du danger inhérent lié au rachat par Searchlight Capital de Latécoère.

Opposition et perte de souveraineté

Dès le 2 octobre, la Confédération générale du travail (CGT) avait accusé que le fonds américain de vouloir «gagner le plus d'argent possible le plus vite possible» alors que «Latécoère a besoin d'autre chose», d’après BFM-Business. Le syndicat français avait également critiqué l’immatriculation aux îles Caïmans de Searchlight Capital.

Cette technologie de protocole de communication servira rapidement dans la sécurisation des données notamment dans le domaine militaire

Peu de temps après, le 21 novembre, 17 députés LREM, LR, UDI et France insoumise de la commission de la Défense nationale avaient alerté le Premier ministre Edouard Philippe «sur le risque de voir partir à l'étranger la technologie Li-Fi», selon le quotidien occitan. Bastien Lachaud, député LFI, se dit inquiet que diverses industries soient «bradées par Emmanuel Macron et son gouvernement» tout «comme ADP, la FDJ ou Alstom».

De con côté, Jean-Charles Larsonneur, député LREM, se demande : «Latécoère et Photonis sont-ils des actifs stratégiques à protéger ?»

Avant de poursuivre : «Cette technologie de protocole de communication servira rapidement dans la sécurisation des données notamment dans le domaine militaire.» Le président du Conseil économique, social et environnemental d’Occitanie, Jean-Louis Chauzy, avait quant à lui insisté sur une potentielle perte de souveraineté.

Pourtant, l'acquisition d'une entreprise française par des investisseurs étrangers est soumise à l'autorisation préalable du ministère français de l'Economie et des Finances. Notamment les secteurs jugés stratégiques tels que la défense, la sécurité nationale et l'ordre public qui sont protégés par un décret datant de 2005, adopté sous le gouvernement Villepin.

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