Economie

Budget : les entreprises contribueront pour 1,3 milliard d'euros supplémentaires en 2020

Réagissant à un ralentissement économique légèrement plus fort que prévu, Bercy a annoncé une réduction de certains dispositifs fiscaux en faveur des entreprises et le ralentissement du rythme de baisse de l’impôt sur les sociétés.

Le ministère de l’Economie a annoncé le 11 juillet que plus de 1,3 milliard d'euros d'économies seraient réalisées l'année prochaine grâce à une réduction des niches fiscales pour les sociétés (615 millions) et à une baisse d'impôt plus lente que prévu pour les grands groupes (700 millions).

Parmi les niches, le gazole non routier verra disparaître progressivement sa taxation réduite, avec un premier relèvement au 1er juillet 2020. Toutefois l’agriculture et le transport ferroviaire seront épargnés.

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a déclaré devant l'Assemblée nationale que cette mesure rapporterait «un peu plus de 200 millions d'euros dès 2020», ce qui est selon lui «cohérent avec [la] volonté d'accélérer la transition énergétique de la France».

La suppression de cet avantage était initialement prévue pour cette année, ce qui avait suscité des manifestations de fédérations professionnelles. Le gouvernement l'avait suspendue fin 2018 en lien avec la crise des gilets jaunes, dans une pause sur la hausse des taxes sur les carburants.

La Fédération nationale des transports routiers et le BTP ont de nouveau exprimé leurs inquiétudes, mais le ministre a promis un accompagnement, avec des «incitations financières pour acquérir du matériel moins polluant [et des] dérogations pour les entreprises les plus exposées à la concurrence internationale».

En outre, le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin a annoncé que la déduction forfaitaire spécifique serait réduite en 2020, dans la mesure d’une économie de 400 millions d'euros. D’un coût total évalué à 1,5 milliard d'euros pour les finances publiques, cette niche consiste en un abattement de charges patronales dans plusieurs secteurs d’activité industrielle comme le BTP, l'aviation et le nettoyage.

Bruno Le Maire a également annoncé des concertations sur les incitations fiscales au mécénat d'entreprise, mais elles ne devraient pas aboutir avant 2021. Enfin, le crédit impôt recherche sera maintenu, mais les frais de fonctionnement ne pourront plus s'élever au maximum qu'à 43% des sommes consacrées à la recherche, contre 50% jusqu'ici. Cette dernière mesure devrait rapporter 200 millions d'euros en 2021.

«Doctrine hors sol»

Concernant l'impôt sur les sociétés, l’objectif d’un taux abaissé à 25% en 2022 pour toutes les entreprises, qui faisait partie des engagements du président de la République Emmanuel Macron, est maintenu, mais le rythme de cette baisse est ralenti. Pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 250 millions d'euros, le taux passera de 33,3% à 31% en 2020, et pour les autres de 31% à 28%.

Le président de la commission des Finances de l'Assemblée, Eric Woerth (LR), a critiqué ces choix en déclarant, lors du débat d'orientation budgétaire : «L'augmentation de la fiscalité des entreprises et l'augmentation de la dépense pour répondre à des crises dans la panique sont la voie de la facilité.»

L'insoumis Eric Coquerel a lui fustigé une «doctrine hors sol et mortifère […] celle des petits pas pour l'intérêt général et des grandes foulées pour les profits de quelques-uns».

Malgré ces nouvelles dispositions, le gouvernement a dégradé sa prévision de déficit public de 0,1 point à -2,1% pour 2020, ainsi que pour les années suivantes. La dette publique devrait stagner en pourcentage du PIB l'an prochain, à 98,9% du PIB (contre 98,7% prévu au printemps). «Vous vous gargarisez d'améliorer le déficit public, mais à quel prix [pour] nos concitoyens [et] nos territoires», s'est indigné le communiste Jean-Paul Dufrègne.

Chef de file des députés PS, Valérie Rabault a pointé «la difficulté à boucler l'équation budgétaire» pour le gouvernement, qui bénéficie de la «bonne étoile de la baisse des taux d'intérêt» mais est pénalisé par «un recul de la croissance économique». «Vous ne dégagez pas de priorité sur la baisse de la dépense publique», a-t-elle aussi estimé, tandis que des membres de La République en Marche (LREM) comme Bénédicte Peyrol ont jugé que cette baisse n'allait pas assez loin.

En juin, la Banque de France avait révisé à la baisse ses prévisions de croissance du PIB à 1,3% en 2019, et 1,4% en 2020 et 2021 contre 1,4% et 1,5% au début du printemps.