Economie

Ford souhaite la fermeture d'une usine de Gironde : un choix «incompréhensible» pour Le Maire

Bruno Le Maire a manifesté sa colère contre Ford qui préfère fermer son usine de Blanquefort (Gironde) plutôt que de la céder à un repreneur. Une position «indéfendable» pour le ministre de l'Economie qui dit avoir alerté le gouvernement américain.

«J'ai eu le président de Ford vendredi dernier [12 octobre] au téléphone et le président m'a annoncé qu'entre une reprise du site par Punch [Powerglide Starsbourg] et la fermeture de l'usine, l'option privilégiée par Ford était la fermeture de l'usine. Je suis en désaccord total avec ce choix», a déclaré Bruno Le Maire à Bordeaux, ce 15 octobre, à l'issue d'une réunion avec des élus locaux et des représentants des quelque 850 salariés de l’usine de pièces détachées de Ford à Blanquefort (Gironde).

Déterminé à ce que «l'option de la reprise soit retenue», le ministre de l’Economie, cité par l’AFP, a affirmé avoir multiplié au cours du week-end les appels auprès de l'administration américaine. «Je souhaite que nous nous mobilisions tous pour maintenir l'activité industrielle [...] et que plutôt qu'une fermeture nous allions vers une reprise par Punch, un repreneur solide», a déclaré le locataire de Bercy.

Selon lui, «si Ford prenait la décision de fermer sèchement l'usine de Blanquefort le coût serait supérieur à une reprise», un choix que Bruno Le Maire juge «incompréhensible».

L’usine – dont l'ex-candidat à l’élection présidentielle du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) Philippe Poutou est délégué CGT – fait en effet l’objet d’un projet de reprise par Punch Powerglide Strasbourg. Une entreprise mondiale de boîte de vitesses pour automobiles, rachetée à General Motors en 2013 par le Belge Guido Dumarey, et dont le siège se trouve à Strasbourg.

Pour Philippe Poutou, Ford «préfère fermer l'usine que favoriser la reprise car cela lui coûte moins cher au global». Il explique aussi qu’une reprise signifierait «obligatoirement des engagements de Ford pour assurer la transition» car Punch Powerglide Strasbourg aurait «un plan sérieux, mais pas avant trois ans».

Le maintien de l’activité de Ford s’apparente aujourd’hui à un marchandage déjà ancien. En septembre, Bruno Le Maire avait en effet invité Ford «à prendre ses responsabilités», appelant le groupe américain à «participer à cette période de transition» du site qui compte 847 salariés.

Un marchandage pour l'emploi local et régional 

Le ministre avait qualifié le plan de charge d'insuffisant et souhaité «avoir des assurances sur les volumes [de commandes de boîtes de vitesses et de carters, que fabrique l'usine] que Ford devrait laisser en 2019, 2020 et 2021».

Etat et collectivités territoriales se sont engagés ce 15 octobre à apporter une aide financière afin de permettre la réussite de cette reprise. Bruno Le Maire a assuré que l'Etat était prêt à investir 5 millions d'euros à Blanquefort.

Alain Juppé, président de Bordeaux Métropole et maire de la ville, a lui aussi dénoncé l'attitude du constructeur américain. «Ford continue à nous mener en bateau», a-t-il estimé, ajoutant que les collectivités territoriales s’étaient engagées à apporter 12,5 millions d'euros. Il a même détaillé que les deux tiers seraient financés par la région Nouvelle Aquitaine et un tiers par la Métropole en quittant la réunion. 

Pour Alain Rousset, président de la région Nouvelle Aquitaine, «Ford a envie de plier les gaules» ce qui est «totalement inadmissible». Il souhaite en outre que la Commission européenne soit interpellée afin d'examiner les aides qu'elle verse à Ford Europe.

La «plus grosse usine d'Aquitaine»

Fin février, Ford avait annoncé cesser tout investissement dans son usine girondine, et rechercher un repreneur pour le site implanté dans la banlieue bordelaise depuis 1972. Selon Philippe Poutou, cité par l’AFP, sur les 847 salariés du site, 390 souhaitent partir en pré-retraite et un maximum de 400 pourraient être repris par Punch. Dans une interview publiée le 14 octobre dans le Journal du Dimancheil explique pourquoi «le gouvernement a intérêt à ne pas voir cette usine disparaître».

Le candidat trotskiste et délégué syndical CGT explique notamment que «c'est la plus grosse usine d'Aquitaine» et il estime qu’avec les emplois indirects et les sous-traitant, l’usine représente autour de 4 000 emplois. A ses yeux, «sa fermeture serait un signal politique négatif pour les autorités». Il rappelle aussi qu’à plusieurs reprises le site a été menacé par la direction centrale qui semble fuir toute négociation avec les syndicats. Mais en 2013, la direction, après l’intervention des pouvoirs publics français, avait fini par signer un plan quinquennal de maintien de l’emploi qui arrive justement à échéance.