«Stoppons l’escroquerie financière des privatisations de la loi Pacte !», écrit Nicolas Dupont-Aignan, député de l'Essonne et président de Debout la France, en titre d’une lettre aux parlementaires publiée le 1er octobre sur le site internet de l’hebdomadaire Marianne.
Pour point de départ à sa démonstration, Nicolas Dupont-Aignan rappelle le précédent de la privatisation des autoroutes de France (de 1997 à 2007) en les associant exclusivement à Dominique de Villepin, Premier ministre de Jacques Chirac de mai 2005 à mai 2007. Un affront pour le socialiste Lionel Jospin, déjà Premier ministre de Jacques Chirac pendant près de cinq ans de 1997 à 2002, et à qui revient le début de la privatisation des Autoroutes du Sud de la France (Marseille, Nice, Perpignan, Montpellier) au profit du groupe Vinci.
Le chef du parti souverainiste s’appuie aussi sur un rapport de la Cour des comptes de 2009 qui établirait que «l’Etat avait vendu ces actifs publics à seulement 60% de leur vraie valeur».
De nouvelles privatisations étant prévues par des articles du Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises (loi Pacte), en débat au Parlement cette semaine, Nicolas Dupont-Aignan s’interroge et fait part de ses inquiétudes aux autres membres du Parlement auxquels s’adresse son appel : «Devant une telle erreur, nous pouvions penser que plus jamais l’Etat ne gérerait aussi mal les deniers publics… C’était bien mal connaitre Emmanuel Macron et Bruno Le Maire qui ont décidé de faire de nouveaux cadeaux à leurs amis financiers.»
Le dirigeant du parti souverainiste porte un jugement sévère sur la pertinence des calculs du gouvernement pour justifier la cession au secteur privé de l’équivalent de 15 milliards d’euros de biens de la collectivité. Ces derniers sont constitués d’actifs financiers répartis entre les participations de l’Etat dans ADP, la société qui gère l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle (50,6%), dans La Française des jeux (72%) et dans Engie (24,1%), reliquat de ce qui fut Gaz de France.
L'«incompétence de Bruno Le Maire»
Avec 10 milliards d’euros de produit de cette session (sur 15 attendus au total), l’Etat devrait constituer un fonds destiné à financer l’innovation et qui devrait selon le gouvernement rapporter de 200 à 300 millions d’euros par an, soit un rendement de 2 à 3%. Mais Nicolas Dupont-Aignan souligne, tableau de chiffres à l’appui, (semble-t-il tiré du dernier rapport financier de l'agence des participations de l'Etat) que les dividendes actuels perçus par l’Etat représentent, eux un revenu annuel moyen (sur la période 2012-2017) de 1,26 milliard d’euros. Environ six fois plus ! Ce que le chef de Debout la France résume ainsi :
Une telle incompétence de Bruno Le Maire interroge quant aux véritables intentions du gouvernement
Le député de l’Essonne remarque aussi que cette vente intervient plutôt dans une phase défavorable de la bourse et analyse : «Le cours actuel des actions d’Engie est anormalement bas et ne correspond pas à la véritable valeur de ses actifs. Une telle vente fera perdre 9 à 10 milliards d’euros aux Français par rapport à la valeur d’introduction en Bourse.»
L’auteur de cette tribune rappelle aussi que La Française des jeux et Aéroports de Paris se trouvent en situation de monopole, et qu’«Engie dispose d’une force historique prédominante sur le marché domestique du gaz». C’est pourquoi il estime que «loin de renforcer la concurrence, ces privatisations vont offrir des situations de rente abusive à des actionnaires privés».
Le risque de situations de monopole dans les mains du secteur privé
Il voit aussi un risque à confier à des acteurs privés ADP, qui «contrôle la sécurité et la logistique des aéroports du premier pays touristique du monde qu’est la France» et Engie qui «assure l’essentiel de l’approvisionnement en gaz de la France, sans parler de la distribution par GRTGaz, filiale elle aussi privatisée !».
Pour Nicolas Dupont-Aigan cette vente n’est pas «anodine» et «représente un risque d’abus de position dominante contre les intérêts des consommateurs et usagers français». En préambule à une possible saisie du Conseil constitutionnel, il avance une piste : l’article 9 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 qui stipule que «tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité».
Cela suffira-t-il à interrompre la grande braderie d’actifs financiers de l’Etat engagée par Emmanuel Macron dès son arrivée à Bercy sous Hollande ? En effet, d'août 2014 à juin 2017 (parution du dernier rapport d'activité de l'agence des participations de l'Etat), des participations de l’Etat ont été vendues au privé pour un total de près de 10 milliards d’euros. On n’avait jamais vendu autant d’actions d'entreprises publiques sur une période aussi courte.
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