«Le tribunal conclut que l'accord dans l'ensemble n'est pas juste, adéquat et raisonnable, et donc refuse la motion [...] pour un accord préliminaire.» Le juge Edward Chen a infligé un véritable camouflet à la société de véhicules de transport avec chauffeur (VTC) Uber. Alors qu’elle pensait s’être débarrassée du litige qui l’oppose à ses salariés à grand renfort de millions de dollars, la justice américaine a refusé de valider l’accord.
En avril dernier, Uber s'était dit prêt à payer jusqu'à 100 millions de dollars pour éviter un procès et mettre fin à deux recours, déposés en Californie et dans le Massachusetts. Dans les deux cas, des chauffeurs contestaient leur statut de travailleurs indépendants et réclamaient d'être reclassés comme salariés.
Une affaire médiatique
L’argent était censé financer un fonds de compensation pour les chauffeurs. En échange, ils devaient accepter de conserver leur statut d'indépendant. En plus de ce point clé de l’accord, la société californienne avait accepté de s’engager à améliorer le dialogue avec ses employés, notamment en changeant ses pratiques et en mettant en place une charte de bonne conduite.
Afin de justifier sa décision, Edward Chen a souligné que beaucoup des engagements non-monétaires acceptés par Uber «n'ont pas autant de valeur que ce que les parties suggèrent». Il a cependant reconnu l’effort financier de la société californienne, qualifiant la somme qu’elle souhaitait mettre sur la table de «considérable».
Aux Etats-Unis, l’affaire fait grand bruit et attire les as du barreau. Edward Chen affirme que le tribunal «a reçu (et continue de recevoir) de nombreuses objections, émises à la fois par des personnes individuelles et par des avocats représentant des chauffeurs dans le recours californien».
Un porte-parole d’Uber s’est dit très déçu de la décision de la justice : «L'accord amiable, validé mutuellement par les deux parties, était juste et raisonnable. Nous sommes déçus par cette décision et nous regardons nos options.»
Uber en danger ?
Uber risque très gros dans cette affaire. Si un procès a lieu et que les jurés se rangent du côté des plaignants, cela pourrait mettre en péril la base du modèle de «l'économie partagée» dont il est l'une des figures de proue.
Le modèle économique d’Uber, qui a inspiré une flopée de start-up ses dernières années, repose principalement sur la flexibilité des emplois. Pour se défendre, la société de VTC argue que c’est justement cette souplesse qu’apprécient ses chauffeurs. Elle avance même le fait que 90% de ses employés aux Etats-Unis satisfaits de leur statut de travailleur indépendant.
Le juge demande désormais aux parties de se concerter sur la suite de la procédure, avec une audience prévue le 15 septembre pour faire le point de la situation.