L'Europe risque de manquer de gaz pour l'hiver 2023-24, a alerté l'Agence internationale de l'énergie (AIE) le 3 novembre, en appelant les gouvernements à «agir immédiatement», en particulier pour réduire la demande.
Quelque 30 milliards de mètres cubes de gaz pourraient bien manquer d’ici à l’hiver suivant, en cas d'arrêt complet des livraisons venues de Russie, mais aussi du fait du probable rebond économique de la Chine. En retrouvant des niveaux de consommation semblables à ceux de 2021, cette dernière viendrait en effet absorber une très large part (85%) des volumes de gaz naturel liquéfié (GNL) auquel l'Union européenne entend recourir davantage, estime l'AIE dans ses calculs.
Les réserves européennes ne seraient alors plus remplies qu'à 65% au début de l'hiver 2023-2024, contre 95% actuellement, a indiqué son directeur Fatih Birol lors d'une conférence de presse en ligne.
«Le "coussin" fourni par les niveaux de réserve actuels, de même que la baisse récente des prix du gaz et les températures inhabituellement douces, ne devraient pas conduire à des conclusions trop optimistes quant à l'avenir», met en garde l'AIE dans cette analyse, qui souligne qu'à l'été 2023 les conditions géopolitiques et économiques mondiales pour s'approvisionner et remplir les réserves auront connu des changements significatifs par rapport à 2022.
En réponse au déclenchement de l'offensive russe en Ukraine, l'Union européenne a décidé, de réduire significativement sa dépendance à l'égard du gaz russe. Des pays tels que l'Allemagne voient leur modèle économique particulièrement fragilisé par ces mesures, tandis que la Hongrie a fait cavalier seul pour prolonger ses importations d'énergie depuis la Russie.
155 milliards de mètres cubes de gaz russes consommés par l'UE en 2021
Selon les chiffres de la Commission européenne, l’UE consommait en 2021 environ 400 milliards de mètres cubes de gaz, dont 45% (155 milliards de mètres cubes) étaient assurés par les importations en provenance de Russie. Le plan «Repower EU» doit, selon la Commission, permettre de réduire la dépendance de l’UE au gaz russe de deux tiers avant la fin de l’année 2022, et de 100% à compter de 2027, grâce à la diversification des approvisionnements, au développement massif des énergies renouvelables et à des efforts de chaque pays en vue de réduire la consommation de gaz.
Mi-octobre, le président russe Vladimir Poutine a assuré que la Russie était «prête» à fournir du gaz à l'Europe «y compris [pour] l'automne-hiver actuel», suggérant l'idée d'un acheminement par un hub gazier qui serait situé sur le territoire turc. L'Elysée a pour sa part estimé que ce projet n'avait «aucun sens » compte tenu des engagements européens à réduire le recours aux énergies en provenance de Russie.