Dans une vidéo diffusée le 13 octobre au soir sur les réseaux sociaux, le président malgache Andry Rajoelina a confirmé son départ du palais présidentiel d’Iavoloha, affirmant avoir été l’objet d’une « tentative de meurtre ». « Mon intégrité physique était menacée, un coup d’État se préparait », a-t-il déclaré dans une allocution de 26 minutes. Il a précisé avoir quitté Madagascar pour sa sécurité, tout en réaffirmant qu’il reste président et qu’il « n’y aura pas de démission ». C’est la première fois qu’il s’exprime depuis le basculement d’une partie de l’armée du côté des manifestants.
Rajoelina affirme également avoir refusé l’aide militaire proposée par plusieurs pays tiers, dont des États membres de la SADC, qui proposaient d’envoyer des troupes « comme en Éthiopie ». Il appelle à « respecter la Constitution ». L’allocution, initialement prévue sur la chaîne publique TVM, a été repoussée à deux reprises après l’arrivée de soldats armés sur le site de la télévision. Elle a finalement été diffusée uniquement sur les réseaux sociaux.
Une fuite orchestrée par la France ?
Le président a d’abord quitté la capitale en hélicoptère pour l’île de Sainte-Marie, avant d’être exfiltré de Madagascar le 12 octobre par un avion militaire français. Il aurait ensuite été acheminé à La Réunion, puis à Dubaï. Emmanuel Macron a refusé de confirmer cette opération, mais a affirmé que « l’ordre constitutionnel » devait être respecté à Madagascar.
Cette exfiltration a suscité la colère d’une partie de la population malgache, qui y voit une ingérence directe de la France, ancienne puissance coloniale. Plusieurs médias ont également relancé la polémique liée à la double nationalité de Rajoelina, devenu Français en 2014. À Antananarivo, l’image d’un président soutenu par l’Élysée tout en étant rejeté par son peuple alimente la contestation.
Dans un geste présenté comme un appel à l’apaisement, huit prisonniers politiques ont été libérés. Parmi eux figurent deux Français impliqués dans l’affaire Apollo 21. Ce geste est vu par certains observateurs comme une contrepartie à l’exfiltration.
La rue malgache ne cède pas
Le 14 octobre, Andry Rajoelina a signé un décret annonçant la dissolution de l’Assemblée nationale, alors que les députés s’apprêtaient à voter une procédure de destitution pour « abandon de poste ». Ce décret, publié sur la page Facebook de la présidence, n’a pas été signé de sa main. Il s’appuie sur l’article 60 de la Constitution, alors même qu’une partie de la classe politique et de la population considère désormais son pouvoir comme illégitime.
Mais dans la rue, la contestation ne faiblit pas. Depuis le 25 septembre, la mobilisation est portée par la jeunesse, la GenZ, soutenue par l’unité militaire du CAPSAT, qui refuse désormais de réprimer le peuple. À Antananarivo, les manifestations quotidiennes rassemblent plusieurs milliers de personnes. Les revendications ont évolué : d’abord centrées sur l’électricité et l’eau, elles exigent désormais la fin du pouvoir Rajoelina et du système en place. Le 13 octobre, des milliers de manifestants occupaient encore la place du 13-Mai pour réclamer son départ.