Lors d’une visite à Kinshasa le 25 février, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a lancé un appel à témoins sur les atrocités dans les zones sous occupation de l’armée rwandaise et des terroristes du M23 dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). «Ceux qui ont des preuves sur des crimes de génocide, crimes de guerre ou crimes contre l’humanité sont priés de les envoyer sur le site de la CPI», a-t-il déclaré à l’issue d’une entrevue avec le président congolais Félix Tshisekedi.
Alors que les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, poursuivent leur percée dans l’est de la RDC, après s’être emparés des importantes villes de Goma et de Bukavu, respectivement capitales du Nord et du Sud-Kivu, la CPI a récemment intensifié ses efforts pour enquêter sur les crimes commis dans les zones tombées sous leur contrôle. Karim Khan a annoncé dans ce cadre la tenue d’une Conférence internationale sur la situation dans l’est du pays, qui devrait avoir lieu en avril prochain à Kinshasa.
Cette démarche s'inscrit dans le cadre d'une enquête plus large de la CPI sur les crimes commis dans le Nord-Kivu depuis le 1er janvier 2022. Les autorités congolaises avaient saisi la CPI en mai 2023, demandant une attention particulière aux actions du M23 et des forces rwandaises. En réponse, la CPI a réactivé ses enquêtes et signé un accord de coopération avec la RDC en juin 2023, envisageant la création d'une Cour pénale spéciale en RDC pour renforcer la justice locale.
Parallèlement, des organisations de défense des droits de l'homme, comme Human Rights Watch, ont documenté des exécutions sommaires, des viols et des recrutements forcés de civils par le M23, avec le soutien du Rwanda. Ces rapports soulignent l'urgence d'une action judiciaire pour mettre fin à l'impunité dans la région. La CPI appelle donc toutes les personnes disposant d'informations pertinentes à se manifester, afin de contribuer à la justice et à la réconciliation dans l'est de la RDC.
Des gens «brûlés vifs» dans un bar à Goma
Alors que la crise sécuritaire et humanitaire continue de s’aggraver, des rapports de presse indiquent que des combattants du groupe rebelle et leurs alliés rwandais ont commis de «nouvelles atrocités», notamment à Goma, où plusieurs personnes ont été tuées et brûlées vives dans la nuit du 25 au 26 février.
Selon l’agence de presse congolaise ACP, plus de 200 personnes ont été tuées cette nuit-là dans un «nganda» (un terme local pour désigner un bar populaire) connu sous le nom de 3e Mi-temps, situé dans le quartier de Don Bosco, à la périphérie de Goma. Après avoir incendié ce bar, les combattants du M23 et les soldats rwandais auraient «brûlé vifs» plusieurs personnes, y compris les gérants et les employés de l’établissement, selon des témoins cités par les médias et des images relayées sur les réseaux sociaux.
Cette «atrocité» s'inscrit dans une série de violences perpétrées depuis la prise de Goma par le M23 fin janvier. Auparavant, des rapports de presse avaient indiqué que des combattants du M23, soutenus par l'armée rwandaise, avaient déclenché l'incendie de la prison de Munzenze, où des centaines de femmes ont été violées et brûlées vives.
L’escalade récente des combats a entraîné la mort de milliers de personnes et le déplacement de centaines de milliers d'habitants, aggravant la crise dans l'est du pays. La RDC est confrontée depuis plusieurs années à une guerre meurtrière provoquée par la rébellion du M23, particulièrement actif dans l’est du pays. Le groupe armé a été créé en 2012 par des officiers entrés en rébellion contre le gouvernement.