Migrants: plus de quotas mais des centres de tri
Les dirigeants des «28», réunis en sommet européen à Bruxelles, se sont mis d'accord hier soir pour accueillir 60 000 demandeurs d'asile ou réfugiés. Le texte, plutôt flou, ne fait ni mention de «quotas obligatoires», ni de «volontariat».
Selon plusieurs participants au sommet européen, il y avait hier soir de l'électricité dans l'air à Bruxelles.
«Ou vous êtes solidaires, ou vous ne nous faites pas perdre notre temps» aurait ainsi tempêté le chef du gouvernement italien Matteo Renzi, las de voir ses homologues tergiverser dans les solutions à apporter à la crise migratoire dans laquelle l'Italie est en première ligne (60 000 migrants ont débarqué sur ses côtes depuis janvier).
Italy PM Penzi to #EU "If that's your idea of Europe, you can keep it." #migrantshttp://t.co/CnG0dAmOhe
— Keep Talking Greece (@keeptalkingGR) 26 Juin 2015
Si après des heures de débat houleux, les «28» sont finalement parvenus à se mettre d'accord, c'est sur un texte a minima, vidé notamment de ses aspects les plus polémiques, comme l'instauration de quotas d'accueil obligatoires par pays. Des mesures contraignantes contre lesquelles des pays comme la Pologne, la Hongrie, la République Tchèque et la Slovaquie étaient vent debout.
Que dit l'accord exactement ?
- Le nombre de migrants. En ce qui concerne le nombre de migrants accueillis, les dirigeants européens valident les propositions de la Commission et s'engagent donc à prendre en charge 40 000 demandeurs d'asile, débarqués depuis le 15 avril en Grèce et en Italie plus 20 000 réfugiés, se trouvant actuellement en dehors de l'UE dans des camps de l'ONU.
- Obligation ou volontariat ? Le texte est plutôt flou sur ce point. Si il n'y a plus de «quotas obligatoires» par pays, comme le souhaitait vivement la Commission, le mot «volontariat» n'apparaît pas non plus dans le texte final. Une victoire pour Matteo Renzi qui aurait d'ailleurs, selon plusieurs sources, refusé de parapher l'accord à deux reprises en raison de ce point litigieux. Le projet européen évoque donc officiellement «un engagement contraignant», mais dans les faits il pourrait bien s'agir d'un «mécanisme de solidarité volontaire», comme le laissait entendre Donald Tusk, le président du Conseil européen.
- Des centres de tri. En contrepartie de sa solidarité, l'Europe entend durcir les conditions d'accueil. Ainsi des «centres de tri» seront créés en Italie et en Grèce afin de faire la distinction entre les demandeurs d'asile potentiels, qui pourront être effectivement hébergés sur le sol européen et les migrants économiques qui seront eux, immédiatement renvoyés à la maison. C'est ici, une victoire de la France, qui réclamait depuis des semaines la mise en place de telles structures.
- Renforcement de Frontex. Les «28» ont également décidé d'allouer plus de fonds à l'agence Frontex, chargée de surveiller les frontières européennes, et ce afin que les migrants économiques soit plus efficacement refoulés.
A la sortie de ce sommet, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, qui avait fait de ce texte sur la migration en Europe, l'un des projets phares de sa mandature, semblait un peu désarçonné. «Vu l'ampleur du phénomène, donner une perspective de vie à 60.000 personnes est un effort modeste. Cela prouve que l'Europe n'est pas à la hauteur des principes qu'elle déclame» a-t-il déploré.
#UE@eucopresident et @JunckerEU en collision frontale dans le débat sur les #migrantshttp://t.co/62CQTpjSejpic.twitter.com/nAJ01Hwacx
— Le Soir (@lesoir) 26 Juin 2015
L'abandon des quotas obligatoires par pays semble en effet hypothèquer fortement la portée réelle de ce premier texte de solidarité européenne en matière migratoire.